Les ingénieurs peuvent-ils réparer le monde ?

L’histoire en bref

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i tout-puissant ni pion parmi tant d’autres, l’ingénieur devient un maillon qui, en tandem avec d’autres, peut contribuer à réparer le monde. 

Époque contemporaine

L’ingénieur descend de son piédestal pour mieux guider le monde

Au XXe siècle, trois figures de l’ingénieur se succèdent, d’après le spécialiste Étienne Dejonghe. Avant 1914, savoir rime alors avec pouvoir, faisant des ingénieurs les « grands vassaux » de l’époque. Puis vient le temps des ingénieurs « officiers », qui commandent et organisent les relations hiérarchiques de pouvoir, un temps qui dure jusqu’aux années 1950. À partir de cette époque, les types d’ingénieurs se multiplient, et leur rôle devient moins central dans l’entreprise, faisant d’eux des « cadres » parmi tant d’autres. Le travail de l’ingénieur se formalise en même temps qu’il se banalise : réunions, procédures et formalités de gestion se multiplient, l’éloignant de la technique pour le rapprocher du management.

Héros devenu banal, l’ingénieur devient parfois même bouc émissaire alors que le XXIe siècle commence. L’innovation technique n’est plus systématiquement synonyme de progrès, le capitalisme industriel montre ses limites, et le changement climatique pousse la technologie à reconsidérer sa place dans la société.

Mais, petit à petit, la prise de conscience de la finitude du monde élargit le rôle de l’ingénieur et lui redonne une place centrale tant les problématiques liées au développement durable sont nombreuses. Ni tout-puissant ni pion parmi tant d’autres, l’ingénieur devient un maillon qui, en tandem avec d’autres, peut contribuer à réparer le monde. Urbanisation durable, stockage de l’énergie, nouvelles mobilités, vieillissement de la population, gestion des déchets, etc. : l’ingénieur devient progressivement un interlocuteur indispensable dans les enjeux liés au vivre-ensemble. Dans les écoles d’ingénieurs, les associations d’étudiants engagés pour le climat, les partenariats avec des think tanks écologistes et les prises de position sociétales se multiplient. Plus de 5 000 ans après en avoir exprimé le souhait, l’ingénieur renoue enfin avec ses aspirations de l’Antiquité : avoir un rôle au sein de la cité.